Qui est Joseph Girard (1881-1962) ?

Biographie

La famille paternelle de Joseph Girard est originaire de Viverols en Auvergne. Son père Théophile (1846 – 1887) y est né. Plusieurs générations d’enfants Girard se rendirent en vacances dans la maison familiale.

 

Théophile, entré dans le commerce, noua par le mariage des liens avec une famille d’Avignon, la famille Clerc qui tenait l’hôtel Saint-Yves au 7 de la rue Thiers. C’est là que naquirent trois garçons, Henri en 1879, puis Joseph, le 11 février 1881 et enfin Pierre en 1885.

 

À Nice, Théophile mourut d’une pneumonie alors que Joseph n’avait que cinq ans. Son épouse, Joséphine (1853 – 1936), qui survécut à son mari près de cinquante ans, éleva donc ses trois fils en allant habiter rue de la Croix, une de ces rues calmes protégées des ardeurs du soleil provençal par l’ombre du Palais des Papes. Elle confia ses enfants au collège Saint-Joseph tenu par les Jésuites et dont Joseph écrira plus tard l’histoire.

 

Henri l’aîné mourut sur le champ d’honneur à l’automne 1918 à près de quarante ans. Le troisième, Pierre, inaugura trois générations de médecins Girard avignonnais. Quant à Joseph, il se présentait à l’École des chartes en novembre 1899. Tout en achevant une licence en droit, il y accomplit très honorablement ses années d’études. Sur ces vieux jours, il aimait raconter ses années passées à l’École avec laquelle il entretint toujours de très bonnes relations.

 

Dès lors, toute la vie de Joseph est intimement liée à l’histoire d’Avignon, au rayonnement de laquelle il consacra, avec élégance et discrétion, toute son énergie et son érudition. Durant toute cette première moitié du XXème siècle, on retrouve la présence ou la main de Joseph Girard, dans chaque événement important de la ville. L’un des derniers conscrits à avoir fréquenté le Palais des Papes comme caserne, il travailla ardemment à la restauration du Palais alors rendu aux Avignonnais et dont il connaissait le moindre recoin. Ce fut lui qui permit aux premières expositions d’art de se tenir dans l’enceinte du Palais, accueillant Pablo Picasso ou Georges Braque. Ce fut lui encore qui permit à Jean Vilar de disposer de la cour d’honneur du Palais des Papes pour y installer son festival. 

 

Il choisit de travailler sur le Comtat Venaissin pour sa thèse de l’École des Chartes. Et dès juillet 1901, à peine âgé de vingt ans, il monta pour la première fois le grand escalier des archives départementales qui devait lui devenir si familier.

 

Sorti de l’École des Chartes et libéré de ses obligations militaires, il apprit le métier à la bibliothèque de Rouen, sa première nomination. 

 

Mais cet exil normand fut de courte durée. Dès 1906, il rentrait à Avignon et prenait la direction du musée Calvet. Il devait y œuvrer quarante-deux ans, se dévouant pleinement à la marche de la maison. 

 

Au retour de la guerre de 1914 – 1918 dont il revint capitaine, il fonda un foyer en février 1920, en épousant une fille de la famille Fabre-De Loye, originaire du Nord du Vaucluse et installée à Avignon. Sa femme Thérèse Fabre, catholique très fervente était originaire du nord du Vaucluse. Sa famille paya lourdement le tribut de la Terreur en abandonnant au tranchant de la guillotine dressée par le tribunal révolutionnaire d’Orange, trois de ses filles religieuses. Le Pape Pie XI leur remit la palme du martyre en les béatifiant en 1925 avec vingt-neuf autres de leurs compagnes. Thérèse était fort lettrée et fut l’une des premières jeunes filles du département de la Drôme à devenir bachelière. 

 

Tous les deux s’installèrent à l’extérieur des remparts de la ville au chemin de l’Arrousaire dans une vaste maison ayant appartenu au beaux-parents de Joseph. Ils y élevèrent cinq enfants, Henri né en 1920 qui embrassa la carrière médicale à la suite de son oncle Pierre, René né en 1923 chartiste comme son père mais qui s’exila aux États-Unis, avant d’avoir à la fin de sa vie l’honneur d’être reçu au sein de la prestigieuse Académie Française, Marthe né en 1926 qui s’installa à Paris pour fonder un foyer, Marie née en 1934 qui vit à Marseille et Antoine né en 1937.

 

 

Joseph Girard et sa fille Marthe à Avignon vers 1950. (©Famille Girard)
Joseph Girard et sa fille Marthe à Avignon vers 1950. (©Famille Girard)

 

 

Durant la Seconde guerre mondiale, ce fut Joseph qui travailla à la protection des œuvres du patrimoine avignonnais, en les mettant à l’abri hors d’Avignon, des combats meurtriers et des bombardements alliés.

 

Après la guerre, les organisateurs de ce qui deviendra le festival d’Avignon demandèrent à son fils René qui usait ses souliers dans les rues encore pavées du quartier latin, fréquentait René Char, rencontrait Picasso, de jouer les entremetteurs auprès de son père pour la première exposition au Palais des Papes qu'il organisa avec Jacques Charpier et Yvonne Zervos en 1947. On raconte dans la famille que René, déménageur pour l'heure et malheureusement fort maladroit, endommagea une toile de Picasso lors de son transport.

 

Mais l’œuvre de sa vie restera tout de même l’organisation du Musée Calvet. Il passa sa vie à en augmenter les fonds par des acquisitions variées, permettant et encourageant les legs. Plus encore, il en révolutionna l’organisation, faisant œuvre de pionnier en matière d’agencement. Il aéra largement les œuvres et les tableaux pour en rendre la présentation plus attrayante. Il réalisa dans l’ancienne chapelle du collège des Jésuites, témoignage de la présence de l’architecture italienne à Avignon, le très beau musée lapidaire consacré aux collections antiques du Musée Calvet. Lui qui ne fréquentait pas les congrès et ne quittait guère Avignon, il fut très honoré d’être invité à l’École du Louvre pour exposer la manière dont il avait organisé son musée.

 

En 1949, alors qu'il prenait sa retraite, on ne voulut point le laisser quitter la direction du musée Calvet sans lui décerner la légion d’honneur. Mais la retraite ne signifia pas pour lui la fin de son activité. Bien au contraire, ce fut le temps où il élabora la partie la plus importante de son œuvre éditoriale. Il resta encore attaché à son musée dont il devint l’administrateur, et à Avignon en devenant conservateur du Palais des Papes. Il passait alors le plus clair de son temps à faire visiter le Palais à des groupes de savants, à des personnalités illustres, chefs d’État ou cardinaux. Mais ce qu’il préférait avant tout, c’était accueillir avec simplicité les visiteurs ordinaires qui se présentaient aux portes du Palais.

 

L’année de ses quatre-vingt ans, en juin 1961, il subit une opération dont il se remit mal.

C’est le 7 mai 1962 qu’il mourut, entouré des siens.

 

Oeuvre

Joseph Girard laisse à la postérité un travail considérable sur l’histoire d’Avignon. Tout d’abord, centré sur le musée Calvet et son histoire, son travail se porta ensuite sur une histoire monumentale de la ville. Il la réalisa à travers un ouvrage d’art, Avignon, ses monuments, ses trésors d’art, que l’éditeur marseillais Détaille édita avec de nombreuses illustrations et photographies en 1930. 

Puis dans son Évocation du vieil Avignon publié en 1958. Après une description du Palais, on y parcourt les rues de la cité en y évoquant ses églises, ses hôtels, son architecture et en y apprenant au détour d’une rue des histoires anecdotiques. 

 

À la fin de sa vie, il s’intéressa à l’histoire des familles avignonnaises, en particulier de la famille Baroncelli dont l’hôtel est aujourd’hui le Palais du Roure. Son intérêt pour cette famille florentine installée à Avignon dans la seconde moitié du XVème siècle et dont il classa les archives, lui permit d’en écrire l’histoire de manière très vivante dans les Baroncelli d’Avignon, publié en 1957.

 

Chronologie

  •  février 1881 : Naissance de Joseph Girard à Avignon, de Théophile Girard, originaire de Viverols en Auvergne, et de Joséphine Clerc, native d'Avignon.
  • 1886 : Théophile Girard s'éteint à Nice.
  • 1899 : Joseph Girard intègre l'École des Chartes. 
  • 1901 : Il prépare son mémoire de11 fin d'études sur le Comtat Venaissin. 
  • 1904 : À sa sortie de l'ENC, il est nommé à la bibliothèque de Rouen. 
  • 1906 : Il prend la direction du Musée Calvet à Avignon, pour quarante-deux ans.
  • 1914-1918 : Combattant de la Grande Guerre dont il revient capitaine. 
  • Février 1920 : Il épouse Thérèse Fabre, originaire du Nord Vaucluse, et s'installe définitivement à Avignon dans une maison de famille au chemin de l'Arrousaire, extra muros
  • 24 décembre 1920 : Naissance de son premier fils, Henri. 
  • 25 décembre 1923 : Naissance de son second fils, René. 
  • Mars 1926 : Naissance de sa première fille, Marthe.
  • 1930 : Il publie un ouvrage d'art, Avignon, ses monuments, ses trésors d'art
  • 1934 : Naissance de sa seconde fille, Marie.
  • 1937 : Naissance de son troisième fils, Antoine.
  • 20 mars 1940 : Il donne une conférence à l'École du Louvre pour exposer ses idées sur l'organisation d'un musée. 
  • 1941-1943 : Il prépare son fils René, futur académicien, au concours d'entrée à l'École des Chartes. 
  • 1947 : Il soutient les premiers pas de la semaine d'art dramatique organisée par Jean Vilar, qui deviendra en 1948 le festival d'Avignon. Il accueille Georges Braque et Pablo Picasso à Avignon. 
  • 1949 : Il prend sa retraite de la direction du Musée Calvet et devient conservateur du Palais des Papes. 
  • 1957 : Il publie Les Baroncelli d'Avignon
  • 1958 : Publication de l'Évocation du vieil Avignon
  • 7 mai 1962 : Il s'éteint à Avignon, dans sa maison de l'Arrousaire.